Synaxaire
Ce troisième dimanche de Pâques, nous célébrons la fête des saintes femmes Myrrophores (Marie-Madeleine ; Salomé ; Jeanne, femme de Khouzas ; Marie et Marthe, les sœurs de Lazare ; Marie, femme de Cléophas ; Suzanne) ; nous faisons aussi mémoire de Joseph d’Arimathie, secret disciple du Seigneur, et nous y ajoutons le souvenir de Nicodème, qui venait de nuit pour écouter Jésus.
Venues près du sépulcre du Sauveur, les Myrophores hésitaient, l’une à l’autre se disant : « Qui donc nous roulera la pierre du tombeau ? » Mais regardant, elles virent que la pierre était roulée, effrayées par l’aspect de l’Ange resplendissant, elles furent saisies de peur et pensèrent s’enfuir, mais le jeune homme leur cria : « Ne craignez point ! Il est ressuscité, celui que vous cherchez ! Venez, voyez le lieu où reposait le corps de Jésus, courez chez les Disciples, annoncez-leur : le Sauveur est sorti du tombeau !»
Lecture des Actes des Apôtres (6, 1-7)
En ces jours-là, comme le nombre des disciples augmentait, les frères de langue grecque murmuraient contre ceux de langue hébraïque, disant que, dans les secours distribués quotidiennement, les veuves de leur groupe étaient désavantagées. Les Douze convoquèrent alors l’assemblée des disciples et leur dirent : « Il n’est pas normal que nous délaissions la parole de Dieu pour le service des repas. Cherchez plutôt parmi vous, frères, sept hommes qui aient l’estime de tous, qui soient remplis de sagesse et de l’Esprit saint, et nous les chargerons de cet emploi. Quant à nous, c’est à la prière et au service de la Parole que nous resterons attachés. Cette proposition fut agréée de tout le monde, et c’est ainsi que furent choisis Etienne, cet homme rempli de foi et de l’Esprit saint, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, un prosélyte d’Antioche. On les présenta aux apôtres qui, après avoir prié, leur imposèrent les mains. Et la parole du Seigneur se développait, les disciples devenaient de plus en plus nombreux à Jérusalem, un grand nombre de prêtres adhérait à la foi.
Lecture de l’Évangile selon saint Marc (15, 43 à 16, 8)
En ce temps-là, la veille du sabbat, arriva Joseph d’Arimathie, membre éminent du conseil, et qui, lui aussi, attendait le règne de Dieu. Il entra courageusement chez Pilate pour réclamer le corps de Jésus. Pilate s’étonna que Jésus fût déjà mort. Il convoqua le centurion et lui demanda s’Il était mort depuis longtemps. Renseigné par le centurion, il accorda le corps à Joseph. Ayant acheté un linceul, celui-ci descendit Jésus, l’enroula dans le linceul, le déposa dans un tombeau creusé dans le roc et roula une pierre à l’entrée du tombeau. Marie de Magdala et Marie, mère de Joseph, regardaient où on avait déposé le corps de Jésus. Le sabbat passé, Marie de Magdala, Marie mère de Jacques, et Salomé achetèrent des aromates pour aller embaumer Jésus. De grand matin, le premier jour du sabbat, elles vinrent au tombeau ; le soleil était déjà levé. Elles se disaient entre elles : « Qui roulera pour nous la pierre de l’entrée du tombeau ? » Levant les yeux, elles virent que la pierre avait été roulée ; pourtant elle était très grande. Entrées dans le tombeau, elles virent, assis à droite, un jeune homme revêtu d’un vêtement blanc et elles furent très effrayées. Mais il leur dit : « N’ayez pas peur ; vous cherchez Jésus, le Nazaréen, le Crucifié ; Il a été ressuscité ; Il n’est pas ici, voici l’endroit où on l’avait déposé. Mais allez ; dites à ses disciples et à Pierre qu’Il vous précède en Galilée ; c’est là que vous le verrez comme Il vous l’a dit. » Elles sortirent et s’enfuirent du tombeau, car elles étaient tremblantes et stupéfaites ; et elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur.
Vous l’avez entendu, très chers frères : les saintes femmes qui avaient suivi le Seigneur sont venues au tombeau avec des aromates : entraînées par leur dévouement, elles continuent à servir même après sa mort, Celui qu’elles ont aimé pendant sa vie. Leur conduite n’est-elle pas le signe de ce qui doit s’accomplir dans la sainte Église ? Car nous devons écouter le récit de leurs actions en méditant sur ce qu’il nous faut faire, à notre tour, pour les imiter.
Si nous sommes remplis d’un parfum de vertus et que nous cherchons le Seigneur accompagnés d’une réputation de bonnes œuvres, c’est comme si nous nous rendions à son tombeau avec des aromates. Ces femmes venues avec leurs aromates voient des anges, de la même manière les âmes qui marchent vers le Seigneur, mues par de saints désirs, avec les parfums de leurs vertus, voient aussi les habitants de la Cité d’en haut.
Il nous faut remarquer ce que signifie le fait qu’elles voient l’ange assis à droite. Que symbolise la gauche, sinon la vie présente, et la droite, sinon la vie éternelle ? C’est pourquoi il est écrit dans le Cantique des Cantiques : « Son bras gauche est sous ma tête, et sa droite m’étreint. » (Ct 2, 6). Puisque notre Rédempteur s’était affranchi de la corruption de la vie présente, il était normal que l’ange venu annoncer sa vie éternelle fût assis à droite.
Il est apparu vêtu d’une robe blanche, parce qu’il annonçait les joies de notre fête. L’éclat de son vêtement est le signe de la splendeur de notre solennité. Devons-nous l’appeler notre solennité ou la sienne ? Mais pour parler plus exactement, appelons-la à la fois la sienne et la nôtre. La Résurrection de notre Rédempteur fut bien notre fête, parce qu’elle nous a ramenés à l’immortalité ; elle fut aussi la fête des anges, puisqu’en nous faisant revenir au Ciel, elle a complété leur nombre. Un ange est donc apparu en vêtements blancs en ce jour qui est en même temps sa fête et notre fête car, tandis que la Résurrection du Seigneur nous ramène au Ciel, elle répare les pertes subies par la patrie céleste.
– St Grégoire le Grand, Homélies sur les Evangiles, homélie 21 du 15 avril 591.
***
Quand nous adorons l’image de la croix vénérable et vivifiante, nous savons qu’elle est tirée du bois. Nous ne vénérons pas la matière, mais l’image qui est le symbole du Christ. Car Il a dit en effet à ses propres disciples comme s’Il leur léguait son testament : « alors apparaîtra le signe du Fils de l’homme dans le ciel » (Mat. 24-30), voulant parler de la croix. C’est pourquoi aussi l’ange de la résurrection dit aux femmes : « Vous cherchez Jésus de Nazareth, le Crucifié ». Il y en a beaucoup de qui sont appelés Jésus et beaucoup qui prétendent être le Christ, mais nous adorons le seul crucifié. Il ne dit pas : percé d’une lance, mais crucifié. Il faut donc adorer le signe du Christ. Car là où est son signe, Lui y est aussi. Mais il n’y a pas à adorer la matière dont est faite l’image de la croix, même si elle est en pierre précieuse ou en or.
– St Jean Damascène, Exposé de la foi orthodoxe, IV.
***
L’entreprise des femmes ne parait pas – humainement parlant - pouvoir réussir. Et cependant elles se sont mises en route. Sans savoir comment, elles entreront dans le sépulcre, elles marchent vers lui. De même, sans savoir comment sera ôté l’obstacle qui peut-être nous empêche d’avoir accès au Sauveur, ayons confiance. Faisons un premier mouvement. Levons-nous. Mettons-nous en route. Marchons vers Jésus que la lourde pierre sépare de nous. Que la foi et l’espérance nous guident.
Les femmes ne vont pas au sépulcre les mains vides. « Elles achetèrent des aromates pour aller oindre son corps. » Apportons, nous aussi, quelque chose au sépulcre. Même si nous sommes souillés par les plus grands péchés, apportons au sépulcre un commencement de bonne volonté, notre peu d’amour, un acte charitable envers d’autres, notre faible prière. Sans doute ce ne sont pas nos pauvres dons qui obtiendront que la pierre soit ôtée, car notre accès à Jésus ressuscité et à la puissance de sa Résurrection demeure le présent magnifique et entièrement gratuit de la miséricorde divine. Mais le fait que nous ne nous acheminons pas vers le sépulcre avec des mains tout à fait vides montrera que notre cour non plus n’est pas vide. Où sont les « aromates » avec lesquelles nous voulons « oindre » Jésus ?
Et voici que le miracle s’est produit. « Elles virent que la pierre avait été roulée. » Les femmes n’auraient pas pu enlever cet obstacle. Mais Dieu lui-même y a pourvu. L’Évangile que nous lisons ce dimanche ne précise pas comment la pierre de l’entrée du sépulcre fut roulée. Un autre Évangile est plus explicite : « Et voilà qu’il se fit un grand tremblement de terre : l’Ange du Seigneur descendit du ciel et vint rouler la pierre… » Ce verset est riche de sens. Quand l’ange du Seigneur vient ôter la pierre du sépulcre, il ne la roule pas doucement. Ce n’est pas une opération qui puisse s’accomplir sans effort, sans une commotion violente et profonde. Il y faut un tremblement de terre. De même, l’enlèvement de l’obstacle qui nous sépare de Jésus ne doit pas être conçu par nous comme un ajustement partiel. Il ne s’agit pas d’ôter ou de déplacer quelques pierrailles, de modifier quelques détails en laissant l’ensemble aussi inchangé que possible. Là encore, un tremblement de terre doit intervenir. C’est-à-dire que le changement doit être total, atteignant tous les aspects de notre être. La conversion est un « tremblement de terre » spirituel.
– Un moine de l’Église d’Orient, L’An de grâce du Seigneur